Foyer Rural de Verrines

À la croisée des initiatives

Poètes d’aujourd’hui

25 mars 2020

Poètes d’aujourd’hui

 

Mur de poésie

 

 

Esplanade de l’Abbaye Royale

 

Jean-François Mathé

Jean-François Mathé 
Mur de poésie

Parfois un regard de femme

se lasse du ciel.

Alors des nuages viennent,

descendent si près de son visage

que parmi la pluie

elle pourrait choisir ses larmes.

Esplanade de l’Abbaye Royale


Jean-François Mathé

“La vie atteinte” éditions Rougerie, 2014

Un pas du ciel bleu

s’est arrêté dans la fenêtre.

Dans la maison qui bientôt

invitera l’été tout entier,

les ombres sont des robes qui s’échancrent

sur des colliers aux grains de lumière.

Les verres sur la table étreignent l’eau fraîche

pour en écarter la soif,

la faire durer jusqu’à ce qu’elle soit

la soif non de l’eau mais de sa transparence.

Square Pierre Billard 


Jean-François Mathé

Semaines poétiques celloises, mars 2017

Je n’aime pas les voix

qui transpercent la neige

mais celles qui sont ses flocons

et chantent le ciel à la terre

qui seule entendra la chanson.

J’ai vu passer,

comme des fourgons lourds et clos,

les nuits les plus noires,

maculées de la boue de nos rêves

qu’elles écrasaient.

Mais quand au matin

on dételait les chevaux

qui les avaient tirées,

eux étaient toujours

blancs et sans taches.

Où est le vrai de la vie ?

Regarde longtemps le soleil

puis ferme les yeux

sur la flamme qui consume

leur couleur et leurs larmes.

Dans tes yeux rouverts

tu verras le monde comme une fumée

qui a pris en toi tes douleurs

et les efface en s’effaçant.

Passage du Puits Gachet

Maria Quintreau

Maria Quintreau

Revue Saraswati, mai 2014

Écrit un matin, sur un quart de page blanche, en regardant les kakis du jardin…

Pas de mots, pas

trop difficile

aléatoire

rien

pas dire

peu dire

oh être écureuil

Et puis aussi ceci

Le vert tendre

du gazon

lui était entré

par les narines

empêchant toute respiration

oh se secouer

que n’ai-je une panse

pour mieux digérer

tous les verts du monde

Et puis également

Pourquoi l’oiseau

le gros

le noir

au pied de la haie de charmes

et pourquoi le petit

le gris

sous le catalpa

et pourquoi

tous ces pourquoi

oh morsures d’enfance

Et puis plus loin

Présente à moi

tous ces mots sur mes traces

Et plus loin encore

Ouf

s’est sauvé le chevreuil

tournent en rond les chasseurs

digèrent mal leur débâcle

Chemin de Pissot


Matin de janvier

blanches branches de givre

printemps en hiver

Maria Quintreau

Chemin de Pissot


Un panneau, un nom

toponymie heureuse

Celles-sur-Belle

 

Petite cité dite

de caractère

son chemin des poètes

 

Sentier promenoir s’y

croisent des poèmes

heureux voyageurs

 

Des mots, leurs reflets à

l’or de nos pupilles les

laisser jouer

Maria Quintreau

Haïkus de campagne Éditions Alcyone, 2018

Rue des Halles

Guy Griffault

Guy Griffault

L’hiver apparaît

les jardins à la française

se disent à la russe

Guy Griffault

Chemin de Pissot

Sofia Queiros

Sofia Queiros

Semaines poétiques celloises, mars 2014

Quel cours avons-nous remonté

pour arriver jusqu’à l’océan

D’une maison de pierre blanchie à la chaux

Jusqu’à l’obscurité d’une cage chauffée

pour le prix du loyer

La chaufferie nous l’entendions ronronner

de nos fenêtres

Et les radiateurs notre nostalgie des feux

De quoi dirais-je vivre

Éditions Être et Connaître, 2006

Sentier de randonnée


EXT. JOUR

Un homme rougeaud rit. Il dit que je perds mon temps. Du temps j’en ai beaucoup trop à ne savoir trop qu’en faire. Il dit que l’autre vit dans un village voisin, coincé entre deux bosquets. Il dit que la cheminée fume nuit et jour.. Que certains en savent sur la peur.

Il rit aussi que la pluie n’arrive jamais jusque-là.

Et puis plus rien de rêves

Éditions Isabelle Sauvage, 2012

Parking des Halles


EXT. JOUR

Je lutte pour ne pas perdre de plumes. Dans la quiétude du vieux jardin, il est dit que

une pierre suffit pour deux oiseaux; deux oiseaux-misère, deux rouges-queues qui froissent du papier noir.

De mon perchoir j’ai vue sur la vallée rousse et tremblante.

Je vis un jour de plus.

Et puis plus rien de rêves

Éditions Isabelle Sauvage, 2012

Sentier de randonnée

Paul Badin

Paul Badin

Choses fuyantes, éditions du Petit Véhicule, 2013

L’éclipse n’angoisse plus

Les pierres du vent à la mûre saison sculptent paroles d’oracle

Plus à portée notre caresse, ajustée

Pour le reste les pierres du chemin : à chacun son lot

Rue des Halles


Ils ont pris à deux mains leur terre aride

ils en ont fait du miel mais les ans inventèrent les orages

Ils ont sculpté des montagnes dans l’éternité du marbre mais d’autres plantèrent leurs drapeaux jusqu’à l’enfer des guerres

Vallée de la Belle


Du plus loin que leur ombre se souvenait,

sous l’arbre irradié de soir,

nulle autre flamme n’avait porté en eux

à tant d’incandescence

Rue des Jardins


Deux mouches vrombissant se poursuivant l’une craquelant la fine voilure de l’autre Maigres ailes mais déjà la jungle

Rue de l’Ancienne Mairie


Devant le mur le mieux tagué du port une brochette de petites vieilles et petits vieux devisent à l’ancienne de tout, de rien Ils furent jeunes en leur temps ils s’en souviennent

Chemin du Lavoir

Albane Gellé

Albane Gellé

Semaines poétiques celloises, mars 2013

nous suivons les rivières

sans savoir compter pile

planètes, comètes

et quand la première feuille

touche le sol, c’est l’automne.

Rue des Halles


entre jasmin et la maison

quel est le jour des souvenirs

prenons balai

(j’oublie le reste)

cherchant lumière sans reflets

j’escalade quelques dunes


nous sommes des ponts, épaules larges

avec des devises de héros, des tabliers

sur une peau profonde et fine

trions les fils, postons des lettres

sans accusés de réception

Rue du Bouchaud


il y aurait un pays sous le mois de décembre

une forêt de syllabes

serrées dans les poitrines

Rue du Bouchaud


penserons-nous à cuisiner avec un peu de citronnelle

tout ça n’a pas la grande ampleur de l’océan

sauf nos détours, sauf nos désirs

Chemin du lavoir

Jean-Claude Martin

Jean-Claude Martin

La jeune fille en robe rouge que tu aimas de loin, silhouette parfaite qui te rappelait… Personne justement.

C’est parce qu’il n’y aurait aucune rencontre qu’elle te parut la plus désirable des femmes. Tu la regardas se mouvoir, courir, danser dans ce joli moment d’été. Là-bas. Près de l’arche du pont… Quand même, tu envias bigrement le jeune homme qui l’accompagnait.

Tourner la page, L’Escampette Éditions, 2009

Route de Vitré


Je reprendrais bien un peu d’été, de jours sans fin, de soirées chaudes comme tisanes digestives. On était en haut de l’horloge. Pourquoi l’aiguille est-elle retombée ? Ils vont nous tuer avec leurs feuilles mortes. Ils en ont mis partout dans la forêt. Un jour, l’automne partira sans nous. Cheveux de bois, vers quel horizon tournez-vous ?

Tourner la page, L’Escampette Éditions, 2009

Rue des Halles


Il pleut des cordes. Voilà le moyen pour grimper au ciel. Mais qu’ils sont glissants, ces haubans ! Il en faut une foi, Seigneur, pour arriver à Vous ! Z’auriez pas des gants ? Voire un petit mot d’encouragement ?… Bref, je ne suis pas allé bien haut. Et je ne sais pas si c’est de sang, de larmes, de sueur, mais maintenant je suis trempé.

Ciels de miel et d’ortie, Éditions Tarabuste, 2011

Chemin de Pissot


D’en haut, on s’attendrait à voir la mer : jardins, terrasses, rues en pente. Mais, en bas de l’avenue, ce bleu n’est… qu’un crépi couleur outremer. Plaine perdue. C’est une ville enchâssée de terres. On ne s’en échappe que par le ciel. Le rêve. Ou l’illusion que les champs, la nuit, ont des rêves d’océan…

Carnet de têtes d’épingles, Éditions Les Carnets du Dessert de Lune, 2011

Sentier de randonnée


Ils se promènent en s’embrassant. Il n’est pas beau, elle n’est pas belle. Matthieu arrive en ville avec Christina, la sculpturale. Il n’est pas son amant. Mais que les autres le croient rend Matthieu heureux. Truqueur, le bonheur. Si relatif, notre esquif. Ça, que tu n’as pas appris : se contenter des apparences. Ou s’en moquer.

Carnet de têtes d’épingles, Éditions Les Carnets du Dessert de Lune, 2011

Rue Emile Verdon

Caé Guimaraes

Caé Guimaraes

Festival franco-brésilien Espírito Poitou 2012

Haiquase da noite outonal I

Viver é puxar

o lençol que cai

na madrugada fria

Haïku de la nuit d’automne I

Vivre est tirer

le drap qui tombe

à l’aube froide

Vallée de la Belle


Haiquase da noite outonal II

Noite que ia

quente nem fria

folha varrendo o quintal

Haïku de la nuit d’automne II

Nuit qui allait

ni chaude ni froide

feuille balayant le jardin

Vallée de la Belle


Haiquase da noite outonal III

Mais uma insônia

quase faceira

anuncia terça-feira

Haïku de la nuit d’automne III

Encore vint une insomnie

presque joueuse

annonce mardi

Vallée de la Belle

Marcos Cysne

Marcos Cysne

Festival franco-brésilien Espírito Poitou 2012

Se mentes ao vento

em ti agruras

ararás em terra dúbia

Si tu mens au vent

tu auras de la peine

à sillonner la terre incertaine

Clocher


Dorme poeta

dunas de pernas pro ar

sonho de areia

Le poète dort

dunes bouleversées

rêves de sable

Passage de la Belle


A pele que habito

Hábito de mim

Será até o fim ?

La peau où j’habite

mon habit

jusqu’à la fin ?

Route de Vitré

Patricia Cottron-Daubigné

Patricia Cottron-Daubigné

Semaines poétique celloise, mars 2015

Femme au violoncelle

Dans le geste savant

et tout le violoncelle du corps

un amour se penche

avive le souffle

de tous les ciels qui viennent

au dernier silence

de la montagne haute celle des vastes vols

et la musique s’élève

déplace l’air doucement et doucement

la plainte des corps et des âmes qui ne savent

la musique s’élève ouvre le monde

une lente montée de lumière profonde de ses ombres

accorde une femme au velours le plus doux

renouvelle son visage

plus loin

que la joie lointaine.

Chemin de Pissot

(après le pont)


C’est un joli mot tzigane

c’est un joli mot roulotte

ou campement et bohémien

c’est joli aussi le temps qu’il faut pour marcher

tresser des paniers d’osier

tresser des regards et des mains

le temps qu’il faut pour aimer

après l’instant d’aimer

Qu’avons-nous fait poète de ce monde

où les mots sont des bruits

des barbelés contre les autoroutes

des sifflements dans le métal et le bitume

où les mots sont des camps

et des pauvres gens ?

Chemin de Pissot

(après le pont)


Chant des fruits rouges

A pleine main à pleine bouche

Comme on mange les plaisirs gourmands

Sur un chemin buissonnier des fruits rouges

Avec des aubépines leur éclat

dans le retour nouveau des jours

on mêle les saisons

tout se gorge de salive

qui coule dans les mots

ô les mots comme les beaux jours

ça fait le corps plus grand

et de grands repos dedans.

Lavoir de Pissot

Sophie G Lucas

Sophie G Lucas

Semaines poétique celloise, mars 2016

il arrive que

le paysage alors

tremblant

se trouble et trébuche

cassé

mais tout

semble tenir

un jour

ou deux

encore

Lavoir du Rochereau


ça étreinte

le coude là de la loire

souffle coupé

tu

de quoi t’emporter

encore loin

de tes ordinaires jours

te sens des ailes

des paquets de terre

pourtant

même pieds lourds

c’est bien là ton ombre

flottante

contre des profils d’oiseaux

Lavoir du Rochereau


les reflets l’eau qui

se prennent dans tes mains

ah la volée de lumière

en loire fondante

à te disparaître

alors

dans les roseaux

ni hauts ni assez nombreux

pour te couvrir

comme si

et puis l’odeur de pluie

se mettre en pièces

dans le paysage

apprendre

à

se défaire

Lavoir du Rochereau

Cécile Guivarch

Cécile Guivarch

Semaines poétiques celloises, mars 2018

un arbre se balance

(je crois que je rêve)

rien n’est plus rêvé que mon rêve

(j’entends autre chose)

sans mots

(j’ai peut-être choisi de me taire)

rien ne paraît comme cela

le ciel est toujours aussi bleu

les arbres semblent à leur place

(quelque chose ne tourne pas rond)

l’oiseau revient avec son chant

se tait comme les fleurs

personne ne l’entend

lové quelque part

(certainement près du cœur)

trop discret pour crier

(il ne faudrait que cela)

du bleu

à la cime d’une montagne

un lac dans les nuages

dans un peu de bonheur

(j’en oublie le monde)

Lavoir du Rochereau

François de Cornière

François de Cornière

Attraper ce qui fuit (1)

Ombre et soleil

soleil et ombre

ombre et soleil

un vrai défilé de nuages blancs

depuis ce matin.

J’ai noté ça pour un poème

et le grand chêne d’à côté

les lignes droites des avions

les hirondelles en vol plané.

François de Cornière Semaines poétiques celloises Printemps des Poètes 2019

Pavillon de gauche de l’Abbaye Royale


Attraper ce qui fuit (2)

Et j’ai pensé que j’étais là

allongé sur l’herbe très verte

après le déjeuner

toujours vivant

toujours vivant.

 

J’ai eu envie de je ne sais quoi

sauf fermer les yeux

me rappeler cette phrase

autrefois de passage entre nous :

«Attraper ce qui fuit».

 

François de Cornière Semaines poétiques celloises Printemps des Poètes 2019

Pavillon de gauche de l’Abbaye Royale


Attraper ce qui fuit (3)

Je me souviens nous regardions

le va-et-vient des mésanges bleues

qui chaque année

comme aujourd’hui

dans leur petit nichoir

-toujours intact si tu savais-

 

recommencent tout

recommencent tout.

 

François de Cornière

Semaines poétiques celloises

Printemps des Poètes 2019

Pavillon de gauche de l’Abbaye Royale

Laure Cambau

Laure Cambau

Échelle

Tu réclames une échelle

on te donne une cage

tu réclames un fil de lumière

et trébuches dans les catacombes

tu réclames le fil pas la patte

l’oiseau pas la cage

la peau sans la crème

l’amour sans le son

l’éternité sans arêtes

la suite sans partitions

 

Laure Cambau Semaines poétiques celloises Printemps des Poètes 2020

Square Pierre Billard (parking de l’Aumônerie)


On recherche : un voyou céleste

signe distinctif

mange les portes

écrit des trous

tombe des arbres

rentre dans les corps par effraction

en sort par les mots…

 

Laure Cambau Semaines poétiques celloises Printemps des Poètes 2020

Square Pierre Billard (parking de l’Aumônerie)


Je t’écris avec la clé

la porte attendra

j’ai mal à ma spirale

et j’écris des nuages

pour un jour peut-être enfin

pleuvoir sur toi

 

Laure Cambau Semaines poétiques celloises Printemps des Poètes 2020

Atelier de l’Aumônerie (parking de l’Aumônerie)

Jean-François Mathé 
Mur de poésie

Parfois un regard de femme

se lasse du ciel.

Alors des nuages viennent,

descendent si près de son visage

que parmi la pluie

elle pourrait choisir ses larmes.

Esplanade de l’Abbaye Royale


Jean-François Mathé

“La vie atteinte” éditions Rougerie, 2014

Un pas du ciel bleu

s’est arrêté dans la fenêtre.

Dans la maison qui bientôt

invitera l’été tout entier,

les ombres sont des robes qui s’échancrent

sur des colliers aux grains de lumière.

Les verres sur la table étreignent l’eau fraîche

pour en écarter la soif,

la faire durer jusqu’à ce qu’elle soit

la soif non de l’eau mais de sa transparence.

Square Pierre Billard 


Jean-François Mathé

Semaines poétiques celloises, mars 2017

Je n’aime pas les voix

qui transpercent la neige

mais celles qui sont ses flocons

et chantent le ciel à la terre

qui seule entendra la chanson.

J’ai vu passer,

comme des fourgons lourds et clos,

les nuits les plus noires,

maculées de la boue de nos rêves

qu’elles écrasaient.

Mais quand au matin

on dételait les chevaux

qui les avaient tirées,

eux étaient toujours

blancs et sans taches.

Où est le vrai de la vie ?

Regarde longtemps le soleil

puis ferme les yeux

sur la flamme qui consume

leur couleur et leurs larmes.

Dans tes yeux rouverts

tu verras le monde comme une fumée

qui a pris en toi tes douleurs

et les efface en s’effaçant.

Passage du Puits Gachet


Maria Quintreau

Maria Quintreau

Revue Saraswati, mai 2014

Écrit un matin, sur un quart de page blanche, en regardant les kakis du jardin…

Pas de mots, pas

trop difficile

aléatoire

rien

pas dire

peu dire

oh être écureuil

Et puis aussi ceci

Le vert tendre

du gazon

lui était entré

par les narines

empêchant toute respiration

oh se secouer

que n’ai-je une panse

pour mieux digérer

tous les verts du monde

Et puis également

Pourquoi l’oiseau

le gros

le noir

au pied de la haie de charmes

et pourquoi le petit

le gris

sous le catalpa

et pourquoi

tous ces pourquoi

oh morsures d’enfance

Et puis plus loin

Présente à moi

tous ces mots sur mes traces

Et plus loin encore

Ouf

s’est sauvé le chevreuil

tournent en rond les chasseurs

digèrent mal leur débâcle

Chemin de Pissot


Matin de janvier

blanches branches de givre

printemps en hiver

Maria Quintreau

Chemin de Pissot


Un panneau, un nom

toponymie heureuse

Celles-sur-Belle

 

Petite cité dite

de caractère

son chemin des poètes

 

Sentier promenoir s’y

croisent des poèmes

heureux voyageurs

 

Des mots, leurs reflets à

l’or de nos pupilles les

laisser jouer

Maria Quintreau

Haïkus de campagne Éditions Alcyone, 2018

Rue des Halles


Guy Griffault

Guy Griffault

L’hiver apparaît

les jardins à la française

se disent à la russe

Guy Griffault

Chemin de Pissot


Sofia Queiros

Sofia Queiros

Semaines poétiques celloises, mars 2014

Quel cours avons-nous remonté

pour arriver jusqu’à l’océan

D’une maison de pierre blanchie à la chaux

Jusqu’à l’obscurité d’une cage chauffée

pour le prix du loyer

La chaufferie nous l’entendions ronronner

de nos fenêtres

Et les radiateurs notre nostalgie des feux

De quoi dirais-je vivre

Éditions Être et Connaître, 2006

Sentier de randonnée


EXT. JOUR

Un homme rougeaud rit. Il dit que je perds mon temps. Du temps j’en ai beaucoup trop à ne savoir trop qu’en faire. Il dit que l’autre vit dans un village voisin, coincé entre deux bosquets. Il dit que la cheminée fume nuit et jour.. Que certains en savent sur la peur.

Il rit aussi que la pluie n’arrive jamais jusque-là.

Et puis plus rien de rêves

Éditions Isabelle Sauvage, 2012

Parking des Halles


EXT. JOUR

Je lutte pour ne pas perdre de plumes. Dans la quiétude du vieux jardin, il est dit que

une pierre suffit pour deux oiseaux; deux oiseaux-misère, deux rouges-queues qui froissent du papier noir.

De mon perchoir j’ai vue sur la vallée rousse et tremblante.

Je vis un jour de plus.

Et puis plus rien de rêves

Éditions Isabelle Sauvage, 2012

Sentier de randonnée


Paul Badin

Paul Badin

Choses fuyantes, éditions du Petit Véhicule, 2013

L’éclipse n’angoisse plus

Les pierres du vent
à la mûre saison
sculptent paroles d’oracle

Plus à portée
notre caresse, ajustée

Pour le reste
les pierres du chemin :
à chacun son lot

Rue des Halles


Ils ont pris à deux mains leur terre aride

ils en ont fait du miel
mais les ans inventèrent les orages

Ils ont sculpté des montagnes
dans l’éternité du marbre
mais d’autres plantèrent leurs drapeaux
jusqu’à l’enfer des guerres

Vallée de la Belle


Du plus loin que leur ombre se souvenait,

sous l’arbre irradié de soir,

nulle autre flamme n’avait porté en eux

à tant d’incandescence

Rue des Jardins


Deux mouches vrombissant
se poursuivant
l’une craquelant
la fine voilure de l’autre
Maigres ailes mais déjà la jungle

Rue de l’Ancienne Mairie


Devant le mur
le mieux tagué du port
une brochette de petites vieilles
et petits vieux
devisent à l’ancienne
de tout, de rien
Ils furent jeunes en leur temps
ils s’en souviennent

Chemin du Lavoir


Albane Gellé

Albane Gellé

Semaines poétiques celloises, mars 2013

nous suivons les rivières

sans savoir compter pile

planètes, comètes

et quand la première feuille

touche le sol, c’est l’automne.

Rue des Halles


entre jasmin et la maison

quel est le jour des souvenirs

prenons balai

(j’oublie le reste)

cherchant lumière sans reflets

j’escalade quelques dunes


nous sommes des ponts, épaules larges

avec des devises de héros, des tabliers

sur une peau profonde et fine

trions les fils, postons des lettres

sans accusés de réception

Rue du Bouchaud


il y aurait un pays sous le mois de décembre

une forêt de syllabes

serrées dans les poitrines

Rue du Bouchaud


penserons-nous à cuisiner avec un peu de citronnelle

tout ça n’a pas la grande ampleur de l’océan

sauf nos détours, sauf nos désirs

Chemin du lavoir


Jean-Claude Martin

Jean-Claude Martin

La jeune fille en robe rouge que tu aimas de loin, silhouette parfaite qui te rappelait… Personne justement.

C’est parce qu’il n’y aurait aucune rencontre qu’elle te parut la plus désirable des femmes. Tu la regardas se mouvoir, courir, danser dans ce joli moment d’été. Là-bas. Près de l’arche du pont… Quand même, tu envias bigrement le jeune homme qui l’accompagnait.

Tourner la page, L’Escampette Éditions, 2009

Route de Vitré


Je reprendrais bien un peu d’été, de jours sans fin, de soirées chaudes comme tisanes digestives. On était en haut de l’horloge. Pourquoi l’aiguille est-elle retombée ? Ils vont nous tuer avec leurs feuilles mortes. Ils en ont mis partout dans la forêt. Un jour, l’automne partira sans nous. Cheveux de bois, vers quel horizon tournez-vous ?

Tourner la page, L’Escampette Éditions, 2009

Rue des Halles


Il pleut des cordes. Voilà le moyen pour grimper au ciel. Mais qu’ils sont glissants, ces haubans ! Il en faut une foi, Seigneur, pour arriver à Vous ! Z’auriez pas des gants ? Voire un petit mot d’encouragement ?… Bref, je ne suis pas allé bien haut. Et je ne sais pas si c’est de sang, de larmes, de sueur, mais maintenant je suis trempé.

Ciels de miel et d’ortie, Éditions Tarabuste, 2011

Chemin de Pissot


D’en haut, on s’attendrait à voir la mer : jardins, terrasses, rues en pente. Mais, en bas de l’avenue, ce bleu n’est… qu’un crépi couleur outremer. Plaine perdue. C’est une ville enchâssée de terres. On ne s’en échappe que par le ciel. Le rêve. Ou l’illusion que les champs, la nuit, ont des rêves d’océan…

Carnet de têtes d’épingles, Éditions Les Carnets du Dessert de Lune, 2011

Sentier de randonnée


Ils se promènent en s’embrassant. Il n’est pas beau, elle n’est pas belle. Matthieu arrive en ville avec Christina, la sculpturale. Il n’est pas son amant. Mais que les autres le croient rend Matthieu heureux. Truqueur, le bonheur. Si relatif, notre esquif. Ça, que tu n’as pas appris : se contenter des apparences. Ou s’en moquer.

Carnet de têtes d’épingles, Éditions Les Carnets du Dessert de Lune, 2011

Rue Emile Verdon


Caé Guimaraes

Caé Guimaraes

Festival franco-brésilien Espírito Poitou 2012

Haiquase da noite outonal I

Viver é puxar

o lençol que cai

na madrugada fria

Haïku de la nuit d’automne I

Vivre est tirer

le drap qui tombe

à l’aube froide

Vallée de la Belle


Haiquase da noite outonal II

Noite que ia

quente nem fria

folha varrendo o quintal

Haïku de la nuit d’automne II

Nuit qui allait

ni chaude ni froide

feuille balayant le jardin

Vallée de la Belle


Haiquase da noite outonal III

Mais uma insônia

quase faceira

anuncia terça-feira

Haïku de la nuit d’automne III

Encore vint une insomnie

presque joueuse

annonce mardi

Vallée de la Belle


Marcos Cysne

Marcos Cysne

Festival franco-brésilien Espírito Poitou 2012

Se mentes ao vento

em ti agruras

ararás em terra dúbia

Si tu mens au vent

tu auras de la peine

à sillonner la terre incertaine

Clocher


Dorme poeta

dunas de pernas pro ar

sonho de areia

Le poète dort

dunes bouleversées

rêves de sable

Passage de la Belle


A pele que habito

Hábito de mim

Será até o fim ?

La peau où j’habite

mon habit

jusqu’à la fin ?

Route de Vitré


Patricia Cottron-Daubigné

Patricia Cottron-Daubigné

Semaines poétique celloise, mars 2015

Femme au violoncelle

Dans le geste savant

et tout le violoncelle du corps

un amour se penche

avive le souffle

de tous les ciels qui viennent

au dernier silence

de la montagne haute celle des vastes vols

et la musique s’élève

déplace l’air doucement et doucement

la plainte des corps et des âmes qui ne savent

la musique s’élève ouvre le monde

une lente montée de lumière profonde de ses ombres

accorde une femme au velours le plus doux

renouvelle son visage

plus loin

que la joie lointaine.

Chemin de Pissot

(après le pont)


C’est un joli mot tzigane

c’est un joli mot roulotte

ou campement et bohémien

c’est joli aussi le temps qu’il faut pour marcher

tresser des paniers d’osier

tresser des regards et des mains

le temps qu’il faut pour aimer

après l’instant d’aimer

Qu’avons-nous fait poète de ce monde

où les mots sont des bruits

des barbelés contre les autoroutes

des sifflements dans le métal et le bitume

où les mots sont des camps

et des pauvres gens ?

Chemin de Pissot

(après le pont)


Chant des fruits rouges

A pleine main à pleine bouche

Comme on mange les plaisirs gourmands

Sur un chemin buissonnier des fruits rouges

Avec des aubépines leur éclat

dans le retour nouveau des jours

on mêle les saisons

tout se gorge de salive

qui coule dans les mots

ô les mots comme les beaux jours

ça fait le corps plus grand

et de grands repos dedans.

Lavoir de Pissot


Sophie G Lucas

Sophie G Lucas

Semaines poétique celloise, mars 2016

il arrive que

le paysage alors

tremblant

se trouble et trébuche

cassé

mais tout

semble tenir

un jour

ou deux

encore

Lavoir du Rochereau


ça étreinte

le coude là de la loire

souffle coupé

tu

de quoi t’emporter

encore loin

de tes ordinaires jours

te sens des ailes

des paquets de terre

pourtant

même pieds lourds

c’est bien là ton ombre

flottante

contre des profils d’oiseaux

Lavoir du Rochereau


les reflets l’eau qui

se prennent dans tes mains

ah la volée de lumière

en loire fondante

à te disparaître

alors

dans les roseaux

ni hauts ni assez nombreux

pour te couvrir

comme si

et puis l’odeur de pluie

se mettre en pièces

dans le paysage

apprendre

à

se défaire

Lavoir du Rochereau


Cécile Guivarch

Cécile Guivarch

Semaines poétiques celloises, mars 2018

un arbre se balance

(je crois que je rêve)

rien n’est plus rêvé que mon rêve

(j’entends autre chose)

sans mots

(j’ai peut-être choisi de me taire)

rien ne paraît comme cela

le ciel est toujours aussi bleu

les arbres semblent à leur place

(quelque chose ne tourne pas rond)

l’oiseau revient avec son chant

se tait comme les fleurs

personne ne l’entend

lové quelque part

(certainement près du cœur)

trop discret pour crier

(il ne faudrait que cela)

du bleu

à la cime d’une montagne

un lac dans les nuages

dans un peu de bonheur

(j’en oublie le monde)

Lavoir du Rochereau


François de Cornière

François de Cornière

Attraper ce qui fuit (1)

Ombre et soleil
soleil et ombre
ombre et soleil
un vrai défilé de nuages blancs
depuis ce matin.

J’ai noté ça pour un poème
et le grand chêne d’à côté
les lignes droites des avions
les hirondelles en vol plané.

François de Cornière
Semaines poétiques celloises
Printemps des Poètes 2019

Pavillon de gauche de l’Abbaye Royale


Attraper ce qui fuit (2)

Et j’ai pensé que j’étais là
allongé sur l’herbe très verte
après le déjeuner
toujours vivant
toujours vivant.

 

J’ai eu envie de je ne sais quoi
sauf fermer les yeux
me rappeler cette phrase
autrefois de passage entre nous :
«Attraper ce qui fuit».

 

François de Cornière
Semaines poétiques celloises
Printemps des Poètes 2019

Pavillon de gauche de l’Abbaye Royale


Attraper ce qui fuit (3)

Je me souviens nous regardions
le va-et-vient des mésanges bleues
qui chaque année
comme aujourd’hui
dans leur petit nichoir
-toujours intact si tu savais-

 

recommencent tout
recommencent tout.

François de Cornière

Semaines poétiques celloises

Printemps des Poètes 2019

Pavillon de gauche de l’Abbaye Royale


Laure Cambau

Laure Cambau

Échelle

Tu réclames une échelle
on te donne une cage
tu réclames un fil de lumière
et trébuches dans les catacombes
tu réclames le fil pas la patte
l’oiseau pas la cage
la peau sans la crème
l’amour sans le son
l’éternité sans arêtes
la suite sans partitions

Laure Cambau
Semaines poétiques celloises
Printemps des Poètes 2020

Square Pierre Billard (parking de l’Aumônerie)


On recherche : un voyou céleste
signe distinctif
mange les portes
écrit des trous
tombe des arbres
rentre dans les corps par effraction
en sort par les mots…

Laure Cambau
Semaines poétiques celloises
Printemps des Poètes 2020

Square Pierre Billard (parking de l’Aumônerie)


 

 

Je t’écris avec la clé

la porte attendra

j’ai mal à ma spirale

et j’écris des nuages

pour un jour peut-être enfin

pleuvoir sur toi

Laure Cambau
Semaines poétiques celloises
Printemps des Poètes 2020

Atelier de l’Aumônerie (parking de l’Aumônerie)

 

 

 

 

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