Poèmes des adultes 2016
Poèmes des petits riens
Nous sommes quelques-uns à guetter des moments sans importance comme
Le moment où il pleut tellement que la nuit tombe avant l’heure…
Et combien j’apprécie alors le feu de cheminée et sa douce chaleur.
Le bruit de la tempête qui souffle sous les fenêtres
Quand nous sommes rassurés par le toit au-dessus de nos têtes
Et réchauffés par notre nouvelle couette !
Le moment où l’enfant pousse son premier cri
Et que se met en route un nouveau chemin de vie.
Le moment où la bouilloire s’arrête de chanter….
Et que mon thé va pouvoir infuser.
Le moment où les villes s’illuminent
Et que leurs lumières colonisent nos pensées collectives.
Rosca
Nous sommes quelques-uns à goûter des moments sans importance,
comme l’instant précis où je mets la cafetière en marche pour le petit déjeuner.
J’aime le prendre seule, et réfléchir à mon emploi du temps,
à rêver, sans avoir à parler.
Comme l’instant où je rentre à la maison,
après une courte absence et où je suis accueillie par les deux chats qui se frottent sur mes jambes, et le chien qui saute de joie.
Comme le coucher de soleil en face de la maison,
chaque soir différent,
flamboyant, brumeux, caché par de gros nuages…
Comme le chant d’un oiseau,
lorsque le soleil de l’après-midi rayonne de tous ses feux
quand la chaleur exhale les parfums des fraises et invite à une pause gourmande, suivie d’une petite sieste…
Tous ces petits riens, grands moments de bonheur et de liberté, tout simples, font oublier les mauvais moments de la vie.
Christiane
Nous sommes quelques-uns à guetter des moments sans importance
comme l’instant précis
où la machine à café se tait et libère le gobelet,
où apparaît la pancarte du village natal en route vers la maison familiale,
où un visage connu surgit dans la foule sur le quai de la gare,
où un SMS arrive « je suis arrivé, tout va bien »…
Tous ces petits riens sont comme une respiration,
d’abord une inspiration en forme de point d’interrogation
suivie d’un soupir de soulagement…
Marie
Nous sommes quelques-uns à guetter des moments sans importance comme
les feuilles qui dansent dans le vent,
le retour de l’oiseau qui se délecte de ce que nous lui offrons,
l’odeur du gâteau qui présage d’une gourmandise,
le chant réconfortant et apaisant de la bûche dans la cheminée,
nous sommes aussi, sans nul doute, nombreux à guetter,
la quiétude et le simple fait d’être là et ensemble.
Yveline
Nous sommes quelques-uns, mais pas nombreux certes, non pas nombreux, à saisir des moments sans importance, enfin, c’est ce que dans un premier temps, on est porté à croire, comme l’instant où le chat, croyant n’être vu de personne, se dresse sur ses pattes arrières et, dans son dos, imite la démarche claudicante du jardinier ; ou encore l’instant où le pivert qui déchiffre un message sur les lichens du grand frêne, éclate de rire et, de proche en proche, colporte cette histoire si drôle, si imprévue.
Plus rares encore sont ceux qui remarqueront que sur le chemin, après l’averse, tous les escargots vont dans la même direction, sauf un qui va dans la direction opposée ; et je ne parle pas des hésitations de certaines feuilles mortes qui n’en finissent pas de planer, virevoltent, hésitent, reviennent, cherchant meilleure compagnie, je n’en parlerai pas non, qui me croirait ?
Jean
Nous sommes quelques-uns à saisir des moments sans importance comme l’instant où je range les clés de la maison dans mon sac à main après avoir verrouillé la porte. C’est aussi le coup de balai pour éliminer les débris rapportés du jardin et qui s’éparpillent sur le carrelage de l’entrée. Instant sans importance, la fermeture de l’étui à lunettes après la lecture du soir. Et puis aussi, petit rien, cet instant fugace où l’on embrasse un collègue sur la joue, humant en passant la chaleur de sa peau.
Ces petits riens sont malgré tout un hymne à la vie, ce plaisir des petites choses qui rythment la journée, c’est aussi un appel vers autre chose, sortir de la maison et rencontrer un autre moment, nettoyer et ranger pour mieux accueillir, s’embrasser pour mieux s’accorder.
Monique
Nous sommes quelques-uns à saisir des moments sans importance,
comme l’instant où le jour finissant après une chaude journée d’été,
écoutant le chant des oiseaux s’endormant
la chaleur se faisant moins épaisse, une légère brise glisse
l’odeur de la terre monte doucement
en laissant la place à la nuit, le temps s’arrête et s’installe.
Sous le ciel étoilé, la douceur de l’air, l’odeur de la terre, au loin le cri d’un oiseau, semblent s’unir pour traverser le temps
le temps d’une nuit.
Carole
Nous sommes quelques-uns à guetter des moments sans importance, comme les aboiements d’un chien au passage du facteur, comme la première goutte sur le carreau lorsque la pluie menace, comme l’odeur du printemps au doigt de la violette de mars, comme l’impalpable rire de décembre lorsque Noël approche… Des petits riens, soit, mais si vivants cependant !
Achem
Nous sommes quelques-uns à saisir des moments sans importance comme
L’instant sacré où le petit moineau dérape sur l’écorce givrée de l’ormeau de Judée, ventre à l’air, bec tourné vers le ciel :
— Un moin’eau qui médite, sur son radeau, médusé ?
— Scène biblique, assurément.
L’instant où se referme la porte-glissière du train. Silence et immobilité s’installent à quai… comme une dernière note qui résonnerait encore sous le doigt de l’artiste.
L’instant solennel où la branche du vieil if agite en souplesse sa parure du soir. En son creux, le jeune hibou froufroutant lustre son plumage avant d’affronter à tire-d’aile une nouvelle nuit de chasse.
Maï
Nous sommes quelques-uns à guetter les moments sans importance comme l’instant précis
où le caramel terne et transparent devient une promesse de vitrail
où le chant pugnace d’une cigale infatigable s’éteint à son tour
où l’araignée d’automne viendra poser ses membres surdimensionnés sur le mur clair du salon
où le pas pesant de mon père est devenu plomb.
Dans le temps qui passe j’aime le cycle et regrette la ligne continue.
Nathalie
Nous sommes quelques-unes à guetter des moments sans importance
Comme la danse parfois dense des poussières dans un rayon de soleil
Les chiures de mouches sur l’abat-jour de la cuisine
Les pattes du chat qui n’ont pas emprunté une ligne droite jusqu’au canapé
Les traces de chocolat sur le rebord de la toile cirée
Le napperon dentelé d’une toile d’araignée au coin du buffet
Sa tasse de café sur le bord de l’évier
Tant pis je ne laisserai pas mon thé refroidir
Myline
Nous sommes quelques-uns à saisir des moments sans importance comme l’instant
où la mésange revient picorer des miettes de pain sur le rebord de ma fenêtre,
où le ciel se voile de rose, comme une ingénue suspendue, à la tombée de la nuit,
où une petite voix d’enfant fluette résonne sur mon répondeur,
où une amie chantonne de joie retrouvée, heureuse d’être là parmi nous.
Ces instants imperceptibles tissent une trame, source de légèreté.
Nicole
Nous sommes quelques-uns à saisir des moments sans importance comme l’instant où
nous sommes tous réunis autour de cette table à griffonner des mots sur une page vierge,
nous souffrons en silence pour mettre en place nos idées,
nous évaluons tranquillement la portée de notre prose avant de l’arrêter définitivement,
nous sommes dans une posture d’ouverture pour livrer nos écrits et recevoir ceux des autres.
Ces petits moments, plaisir d’écrire, plaisir de lire, nous apportent du bien-être et de la joie grâce au jeu des lettres.
Catherine
Nous sommes quelques-uns à saisir des moments sans importance comme l’instant où
nous appuyons machinalement sur le bouton du réveil-matin pour éteindre la sonnerie,
nous cherchons à tâtons nos pantoufles qui ont l’habitude de disparaître pendant la nuit,
nous nous mettons à quatre pattes et finissons par les retrouver sous le lit,
nous nous sentons mi-rêve et mi-réalité, entre la nuit et le jour, tant que l’on n’a pas avalé un bon café.
Ces petits moments sont le début d’une nouvelle journée avec ses surprises et ses rencontres, petits espaces entre hier et demain.
Catherine
Contempler les photos de mes enfants noir sur blanc
Être interpellé par l’éclat d’un détail dans une toile
Réchauffer mes mains en buvant un café noir
Bisouiller le cou nu et chaud de ma petite-fille
Écouter le rougeoiement d’un feu de cheminée
Recevoir un message impromptu
Regarder voleter en liberté une mésange bleue
Rire sur la spontanéité d’un mot d’enfant
Pourquoi ces fragments
tout simplement
pour leur lumière éphémère
et la sérénité de l’instant.
Sabine
Nous sommes quelques-unes à guetter des moments sans importance, comme
la disparition de la bulle qui dérive jusqu’au bord de la tasse
Nous sommes quelques-unes à guetter des moments sans importance, comme
la goutte qui court le long de la vitre
Nous sommes quelques-unes à guetter des moments sans importance
Infiniment.
Anne
Nous sommes quelques-uns, quelques-unes à guetter des moments sans importance
Comme le chat qui s’étire après la sieste de l’après-midi.
Comme la vague qui déferle sur le rivage.
Comme des pas sur le plancher.
Comme l’oiseau qui se pose sur la branche
Comme la fleur qui s’épanouit à la tombée du jour.
Comme le passage du jour à la nuit qui s’annonce.
Tous ces instants de la vie sont à la hauteur de l’importance que l’on y attache, l’essentiel étant que l’on s’y retrouve heureux.
Christine
Poèmes de la couleur
Avec l’encre rose
J’ai écrit ma féminité,
Et tous ceux que cela indispose,
Je les ai tout bonnement gommés.
Laissez-moi vivre ma prose
Tant que je peux encore rêver.
Avec l’encre noire
S’écrit le désespoir,
Le désespoir qui fait boire,
Qui fait voir des tamanoirs,
Tout seul, dans le noir…
Qui a éteint tous les bougeoirs ?
Avec l’encre rose,
On peut écrire pour toutes les causes.
Et que l’on soit timide ou que l’on ose,
C’est pas d’un bec dont a besoin l’alose…
Alors avec l’encre noire,
Corrige-lui les nageoires,
Agrandis-lui le regard…
Tu en mets partout ! Vite, le buvard !
Rosca
Avec l’encre bleu outremer
je peins des vagues profondes sur des rochers écorchés vifs
j’écris la plainte du vent sur des terres meurtries,
pour soigner les blessures de l’humanité.
Avec l’encre vermeille,
je réécris chaque jour mon amour
je dessine la fragilité, la douceur de vivre,
l’instant vécu intensément
la beauté d’une fleur fragile.
Christiane
Avec l’encre rose bonbon,
j’écris les parties interminables et animées
de scrabble ou de « p’tit bac »
et j’écris les hurlements joyeux de victoire des enfants à minuit,
aux parents presque endormis.
Avec l’encre rose bonbon,
j’écris la gourmandise des soirées
tous assis autour du feu dans la cheminée
et j’écris le plaisir de croquer des châtaignes grillées
le bout des doigts noir charbon.
Marie
À l’encre violette,
j’écris les mots et pensées qui font réfléchir et qui donnent du plaisir
je note les noms des écrivains et philosophes qui savent si bien nous parler
j’écris les jours et moments précieux dont les souvenirs sont ressourçants
je note les courses et les rendez-vous à ne pas oublier
je me souviens de l’école, de l’odeur de l’encre violette et des taches sur les doigts,
je respire la force de cette fleur qui porte son nom, si fragile et précieuse et qui se multiplie dans notre jardin pour mieux nous entourer.
À l’encre turquoise,
j’écris ton nom et immédiatement tu apparais
j’écris la joie, ta couleur lumineuse irradie le papier
je vous revois enfants, dès votre plus jeune âge, complices et unies
je suis entourée du bleu que tu portes si souvent et qui est si bien toi !
j’écris les instants passés, les moments rares et ceux du quotidien
entre le bleu et le vert, et grâce à toi, turquoise,
les couleurs de l’arc-en-ciel tout entier et sa symbolique apparaissent et m’enchantent.
Yveline
Avec l’encre bleue j’écris
Sur mes cahiers d’écolier
Nos rêves d’un temps passé
J’écris avec l’encre verte
Le souvenir des prairies
Vibrant du chant des grillons
J’écris d’une encre incolore
Difficile à déchiffrer
Présent Passé Avenir.
Jean
Avec l’encre mauve, je dessine ta robe
De dentelle mousseuse sur ta peau dénudée
Le chapeau léger posant une ombre sur ton visage
Avec l’encre rouge, je dessine ton nez, tu as bu,
Et ta bouche gourmande et charnue,
Et tes pommettes cramoisies qui sourient,
Et l’écharpe de soie qui enroule tes épaules.
Monique
Avec l’encre orange, j’écris l’orange
granuleuse et douce
ronde et brillante
odorante acidulée.
Avec l’encre fuchsia, j’écris les îles
les fleurs se balancent à la brise
transparente ou lumineuse
la couleur illumine la baraque.
Carole
Avec l’encre rouge
j’écris tout ce qui bouge
nos pas bien accordés
les amis retrouvés
Avec l’encre bleue
j’écris les temps joyeux
le ciel même quand il pleut
avec l’encre verte
j’enfonce les portes ouvertes
sur de frileux printemps
Avec l’encre blanche,
j’accroche dans les branches
des lumières dans le noir
Avec l’encre noire
n’écrirai plus jamais
j’ai vidé l’encrier
Michèle
J’écris à l’encre noire
Jet de plume exhumé
Noir ébène des temps immémoriaux
Percée des ténèbres
Sang noir de la vie
Je nais
J’écris en blanc
Au jour laiteux
À l’enfant qui vient de naître
Voile de mariée éclatant de lumière
L’espoir
Maï
Avec l’encre rouge
J’écris clown
Je dessine ses yeux ronds et son rire
Avec l’encre rouge
Je dessine les toits de brique
Les fleurs de capucine
Les cerises à l’oreille de la jeune fille
Je n’écris pas le sang
Avec l’encre verte
Je fête le printemps
Je dis que j’ai vingt ans
Je respire à pleins poumons
L’océan berce ses algues
Avec l’encre verte
J’écris angélique
Je mâche aussi du chewing-gum
Achem
Avec l’encre verte, j’écris souvent le filet d’eau par l’arrosoir répandu et j’écris la menthe veloutée par la chaleur éperdue.
Avec l’encre rose je n’écris jamais le jus des framboises en taches indélébiles mais j’écris le regard de convoitise que tu posais, enfant, sur leurs têtes âpres.
Nathalie
Avec l’encre violine, je détricote le gilet de grand-mère, je respire son eau de toilette lilas, je lui offre un bouquet de violette, je souris, mélancolique sur un vieux cliché jauni.
Avec l’encre rose, je tricote un mohair, pour ma petite-fille, je respire l’eau de rose sur son cou imprégné, je lui couds une robe de princesse, je souris sur sa bouche sucrée guimauve.
Myline
Avec l’encre violette, j’écris
l’histoire de sorcières endiablées,
de chapeaux pointus, de grimoires,
de formules magiques jeteuses de sorts,
de velours moirés qui s’envolent.
Avec l’encre jaune, j’écris
les champs de blé et ses rondes meules
les fleurs de tournesol qui virevoltent,
le rire scintillant des enfants,
une robe du soir à paillettes.
Nicole
Avec l’encre bleue, j’écris sur ton visage
Des nuages si légers qu’ils glissent doucement
Sur ton grand front plissé
Et viennent s’accrocher dans tes cils
Avec l’encre verte, je dessine des arbres de vie
Sur les murs de ces immeubles
Pour qu’un peu d’humanité et de chaleur
Entre au cœur de cette ville de béton
Catherine
Avec l’encre rouge,
rouge comme ton plumage joyeux rouge-gorge
J’écrirai sur le drapeau de la révolution
« Volez de vos propres ailes en toute légèreté, en toute amitié pour l’humanité »
Avec l’encre orange,
je dessinerai un volcan en éruption vomissant sa lave incandescente
Sur ses pentes envahies de scories
Je vois des dizaines, des centaines d’orangers.
Martine
Avec l’encre bleue, j’écris
le mot liberté en calligrammes
Avec l’encre verte, j’écris
le mot espoir en kufique
Avec l’encre cyan, j’écris
le mot tolérance en thuluth
Avec l’encre noire j’écris
le mot amour en naskhi
Avec l’encre indélébile, j’écris
le mot paix en rayhani
Et que l’union de ces couleurs
apporte au prisme des peuples
le temple de la lumière.
Sabine
J’écris ce qui suit…
Avec une encre orange, j’écris ce qui suit
Obligeance, je crie la flamme dans la nuit
Un soleil éteint qui continue d’irradier
Comme les étoiles mortes depuis des millions d’années
Insolence des sens, chapelle ardente des âmes éthérées
Chapelet d’ors chatoyants, un cœur en prière
Avec une encre verte, j’écris ce qui suit
Apaisance, je suis l’herbe tendre après la pluie
Mosaïque mouvante des feuilles moirées
Pénètre la forêt de secrets susurrés
Essences terrestres à nos pas accordés
S’envolent légères au ciel reliées
Avec une encre bleue, j’écris ce qui suit
Turbulences, je fuis la lame qui nuit
Capitale des forces vives au souffle des marées
L’humeur océane varie, la tempête est passée
Efface les larmes de fond sur la crête frappée
Au bord du ciel, mon regard embué contemple la mer
NC
Avec l’encre rouge,
J’écris le contour de mes lèvres
Pour te parler
Et te faire sourire.
Avec l’encre bleue,
J’écris le contour de tes yeux
Ton regard profond m’emporte
Dans les lagons de la nuit.
Avec l’encre jaune,
J’écris le tableau de Miro
Au détour d’un livre
Feuilleté avec audace.
Avec l’encre noire,
Je marque les contours
Des visages
Pour qu’ils s’animent
Et deviennent vivants.
Avec l’encre verte,
J’écris le contour de la feuille
Elle tournoie dans le vent
Et vient se poser
Sur mon livre d’images.
Avec l’encre jaune,
Je dessine les contours du soleil
Qui s’amusera à donner
Ses couleurs à l’été indien.
Christine
Poèmes des maisons
Je connais des maisons
Que de drôles d’oiseaux fréquentent.
Des générations de persécutés les hantent,
Sous le règne de la trahison,
Des lendemains qui déchantent…
Ils resteront en prison,
Sous la triste charpente.
Je connais des maisons
Que de drôles d’oiseaux fréquentent.
Ce sont les Schtroumpfs de Peyo
Qui veulent passer incognito,
Sans aucune autre raison
Que la traque de la verte odeur de menthe.
Rosca
Je connais des maisons
que de drôles d’oiseaux bleus fréquentent
venus tout droit de l’île aux Fleurs
Je connais ces maisons
toutes embaumées d’épices parfumées
et de senteurs tropicales
Je connais deux maisons
presque envoûtées
sous le charme antillais
Je connais deux maisons
sous l’emprise magique de colibris
ces drôles d’oiseaux bleus de Martinique
messagers de légèreté, gaieté et de liberté
Marie
je connais des maisons roses
dont le toit de chaume se fleurit d’iris bleus,
qui regardent avec compassion des maisons grises
sous un ciel plombé de gros nuages gris,
je connais des maisons blanches
écrasées de soleil et de joie de vivre,
peuplées d’enfants qui jouent et se battent à coups de jets d’eau,
avec de grands éclats de rire,
des maisons blanches dont l’ombre rassurante protège,
d’un orage noir qui gronde et étincelle,
je connais une maison bleue, facétieuse,
qui au gré des saisons se cache et se dévoile,
son jardin est envahi par les plantes, et les papillons
le vent joue à faire claquer ses volets,
accueillante, elle ouvre sa porte aux passants attristés,
je connais une maison bleue
que de drôles d’oiseaux fréquentent,
peuplée d’un monde caché et de chauves-souris
tous viennent se ressourcer dans ce havre de paix.
Christiane
Je connais une maison
dite du Chat bleu
à Saint-Savinien sur Charente
que de drôles d’oiseaux fréquentent
Dans le fleuve Charente à Saint-Savinien
avec des bateaux de la couleur du chat
on pêchait autrefois l’ablette
pour en extraire la fausse nacre
Il n’y a plus d’ablettes à Saint-Savinien
plus d’aloses, plus d’anguilles.
Reste une maison où viennent des artistes
une maison bleue avec un chat
qui peut-être se souvient
Jean
Je connais des maisons perdues au creux de la montagne,
elles sont si loin de l’agitation de la société.
Elles semblent bien éloignées les unes des autres.
Elles s’animent en été,
de drôles d’oiseaux bleus les fréquentent !
Les oiseaux sortent au soleil,
ils se prélassent ou s’activent sur les versants pour leur plus grand plaisir.
Le soir venu, à la douceur estivale, les maisons se regroupent,
elles s’ouvrent et étendent leur animation au cœur de la montagne.
Les rires, les chants et les danses les habitent.
Les oiseaux bleus se sont retrouvés.
L’hiver et la neige revenue, les maisons sont de nouveau perdues chacune à sa place.
Les drôles d’oiseaux bleus sont repartis vers l’agitation et la civilisation,
ou sont endormis au coin du feu.
Yveline
Je connais des maisons de pierre
Où le toit en chaume abrite un chat
Qui fait le gros dos sur le faîtage.
On y trouve refuge auprès d’une cheminée
Que de drôles d’oiseaux bleus fréquentent
À la belle saison avant de s’élancer vers l’azur.
Je connais des maisons de pierre
Où il fait bon trouver refuge sous le toit de chaume
Où l’hiver le feu rougeoyant et brûlant
Attire les corps ivres et repus de balades dans la neige.
Monique
Je connais des maisons fermées comme des poings.
Nulle lumière ne filtre et leurs fenêtres sont muettes.
Je connais des maisons blanches dans des îles pétrifiées.
Accrochées haut entre bleu et bleu, elles jouent les équilibristes entre mer et ciel.
Je connais des maisons trop pleines, où il faut se faire une place entre parentèle et bibelot.
Je connais des maisons vides. Leurs habitants ont déserté. Quelqu’un a écrit sur la porte : À vendre.
Je connais des maisons poèmes. De drôles d’oiseaux bleus les fréquentent. Chut ! Ne faisons pas de bruit. Ils pourraient s’envoler…
Michèle
Je connais des maisons
où le jasmin court le long des murs
que de drôles d’oiseaux bleus fréquentent.
Petit colibri
goûte le nectar de la fleur
elle te donnera toute l’énergie
pour faire battre ton cœur
tes cinquante battements d’ailes par seconde
bruissent dans le feuillage
et éclaboussent la vie de sa myriade de couleurs.
Carole
Je connais des maisons abandonnées dans des endroits sinistres, maisons de ville que leurs âmes ont quittées, rues étroites, hautes façades lézardées, quartiers abandonnés, plus personne à s’y hasarder, attention danger… On dit pourtant que de drôles d’oiseaux bleus fréquentent ces demeures, et que ces perroquets seraient faciles à apprivoiser si seulement on osait entrer dans ces coupe-gorges, sans armes, juste quelques mots à prononcer et que sauraient reprendre ces bleus oiseaux de la parole : paix et prospérité.
Achem
Je connais des maisons de toutes sortes
Toit de tuiles ou de tôle,
D’ardoise ou de chaume,
Maisons de style ou sans style,
De Maître, d’accueil,
Un chien méchant montant la garde,
Maisons à vendre,
Ouvertes
Durera à tous vents
Que de drôles d’oiseaux bleus fréquentent…
J’en connais une bien singulière,
Qui durera ma vie entière,
Elle est sans toit, elle est sans murs,
Elle n’a ni sol ni plafond,
Ni cheminée ni toiles d’araignées
La ramure des ans y a tissé des cocons de rêves
Et d’aventures…
J’y ai acquis droit de cité dès ma naissance,
Je me love en son sein, et elle m’habitera
Aussi longtemps que coulera
Le flot précieux de mon imagination.
Maï
Je connais des maisons bleues sur les terrasses desquelles viennent très fréquemment des oiseaux drôles et gais. Elles nourrissent de longues tables aux conversations polyphoniques. Sous leurs murs est tassée une terre riche et sage nourrie de Tramontane insouciante et de pluie saturée de l’odeur de thym. Les enfants qui y ont grandi conservent dans leur regard mûri l’indéniable bonheur d’être au monde.
Nathalie
Je connais des maisons aux toits d’ardoises qui m’ont fait rêver enfant
J’imaginais des châteaux que de drôles d’oiseaux fréquenteraient
Et moi j’étais la princesse endormie sur leurs ailes ambrées
Je ne connais plus de maisons aux toits d’ardoises,
Les obus les ont détruites, les oiseaux bleus se sont enfuis, leurs ailes étaient trop lourdes
Mes doigts saignent sur les tuiles rouges des maisons qu’il faut reconstruire
Je libère mes oiseaux bleus, ce ne sont pas ceux de mon pays,
Les miens sont couleur arcs-en-ciel.
Myline
Je connais des maisons
toutes en dédales et escaliers,
en longs couloirs qui ne finissent jamais,
en cheminées encastrées, en tapisseries décollées,
en pièces vides esseulées,
où la lumière filtre en paillettes de poussière
et que fréquentent de drôles d’oiseaux bleus
en un cauchemar dantesque.
Je connais des maisons
aux toits de chaume, tapies dans la verdure
que fréquentent de drôles d’oiseaux bleus,
encadrées de fleurs vives,
ornées de dentelles aux fenêtres,
des petites chambres matelassées,
des odeurs de gâteaux flottent dans l’air,
des canevas champêtres tapissent les murs,
gemütlich, gemütlich…
il ne manque que les sept nains ou la princesse petits pois !
Nicole
Je connais des maisons au cœur de la forêt que de drôles d’oiseaux bleus fréquentent. Ils planent au-dessus des arbres en poussant des cris stridents et en recouvrant tout le ciel.
Impossible de sortir de ces maisons sans mettre les mains sur les oreilles et courir à toutes jambes,
Impossible de dormir la nuit sans être hanté par d’affreux cauchemars,
Impossible de croiser des regards le jour sans y voir une trace d’effroi ou de terreur,
Non, décidément impossible de continuer à vivre ainsi en supportant ces drôles d’oiseaux bleus au-dessus de nos têtes.
C’est décidé, demain nous partons, nous quittons ces maisons et cette forêt désormais habitées par de drôles d’oiseaux bleus.
Catherine
Je connais une maison
au toit de tôles rouges
aux murs de bois gris clair
aux lambrequins blancs
que de drôles d’oiseaux bleus fréquentent.
Je connais une maison
aux bougainvilliers grimpants
aux orchidées suspendues
aux banians pleureurs
d’où s’échappent de drôles de notes de piano.
Je connais une maison
où une nénène noire cuisine et chante
et où une vieille bourgeoise brode et prie
où le silence rime avec sagesse et entente
et que seul le cliquetis régulier d’une drôle de pendule perturbe.
Les âmes sont parties
à fleur de peau, je déambule
le vieux figuier des Indes me regarde
et je verse des larmes
j’ai connu une maison…
Sabine
Poèmes en « suppose »
Supposez
Que le vent souffle si fort
Que vous deviez attendre
Et que je vous demande
De trouver la tempête de la vie
Pour que soit balayé
Le souffle des regrets…
Suppose
Que le vent
Tempête si violemment
Et que je te demande
De venir me trouver
Pour que je te dise
Combien tu m’as manqué.
Rosca
suppose que je te demande le soleil, et pas la lune,
pour le cacher au fond de ton cœur,
et que je te dise :
jardine dans le nuage bleu !!!
pour voler des étincelles de vie
et faire fleurir la joie
suppose que je te demande toi mon ange :
emmène-moi sur ton aile,
voyageons dans un monde où le merveilleux est quotidien,
pour que la cruauté et la souffrance soient bannies du monde à tout jamais
Christiane
Suppose que la brise de novembre
t’emporte mes vœux du fond de cette hotte
et que je te demande
de les réaliser avant le vingt-quatre décembre
Pour que la brise se change en
une buffée de bises
Marie
Suppose
que les grandes branches du chêne
atteignent les nuages
et que je te demande
de me donner la main
pour que tous les deux
nous allions tout là-haut.
Suppose
que la haie d’aubépines
se couvre de douceur
et que je te demande
de la traverser
pour que nous allions découvrir
ce qui se cache de l’autre côté.
Suppose
que la huppe si majestueuse
devienne notre amie
et que je te demande
de l’écouter
pour quelle nous apprenne
à picorer la vie.
Yveline
Suppose
Que nous retournions au bord du fleuve
À l’heure où les goélands regagnent les îles
Et que je te demande
Quelles sont ces lumières là-bas ?
Tu me dirais c’est Braud-et-Saint-Louis
Et quel silence alors.
Jean
Suppose
Que nous soyons au bord d’une falaise
C’est l’été, le vent, le bruit des vagues en bas,
Les cris des goélands, leurs ailes argentées,
Le scintillement de cette eau vaste et profonde
Et que je te demande
De m’accompagner
Dans un plongeon vers cet abîme attirant
Lâcher le sol et s’enfouir dans l’écume.
Monique
Suppose
que l’on marche sur l’herbe verte et fraîche
pieds nus
Et que je te demande
de marcher sur les cailloux brûlants à côté
penses-tu que la nature est belle mais difficile ?
Ou penses-tu que ton chemin prend parfois de drôles de sentiers
pour arriver au but ?
Carole
Suppose
qu’un arbre ait poussé
au jardin cette nuit
et que je te demande
de céder à l’ivresse d’y grimper
pour cueillir le fruit défendu.
Songe, enfant, combien il est difficile parfois de redescendre.
Suppose
que l’arbre du jardin
ait marché cette nuit jusqu’à la rivière
et que je te demande
de le suivre
pour savoir où il va.
Ne m’écoute pas.
Laisse-le partir. Qui sait s’il gagnera la mer ?
Michèle
Suppose
que nos cheveux au vent
soient un vaste étendard
et que je te demande
d’en éprouver la flamme
pour combattre avec elle
les puissances du mal
Suppose
que le lac vert
s’assèche et se vide
et que je te demande
d’être son sang vermeil
pour qu’à nouveau ricoche
la joie énorme de vivre
Achem
Suppose
Que la vague sournoise
En son creux nous retienne
Et que je te demande
De recueillir l’écume
De nos lendemains engloutis
Sous ce lit de dentelle flottante
Suppose que la pluie
Cesse son bruit soyeux
Sur le carreau jauni
Et que je te demande
De combler le silence
Qui soudain nous assomme
Par un torrent de rires…
Maï
Suppose
que la Loire
te donne son long ruban
Et que je te demande
de quel cadeau il serait l’ornement.
Choisirais-tu un aquarium emprisonnant les brumes de décembre
ou un vase rond où couleraient des galets couleur d’ambre ?
Nathalie
Suppose
Qu’un pot de terre
Tronque ton corps de chair
Et que je te demande de contenir mes rêves
Mon ami, seras-tu capable de devenir pot de fer ?
Suppose
Que la ouate des nuages
T’invite à t’endormir
Et que je te demande de continuer à vivre
Sur la pierre vivante ton combat sera roi
Myline
Suppose
Que ce tilleul centenaire
nous prie de l’épargner
Et que je te demande
à genoux de l’occire
Pour avec lui sauver
Toute une panacée.
Nicole
Suppose
Qu’un jour
Je décide de partir sur une mer ou un océan
Et que je te demande
De naviguer avec moi
Pour partir à la découverte de nouveaux rivages
Tel un goéland ou un fou de Bassan dans le sillage du navire
Martine
Suppose que
les arbres ouvrent leurs branches
pour tourner sur eux-mêmes
au rythme de la terre
et que je te demande
de battre la mesure
pour sentir la sève
circuler dans tes feuilles
Anne
Suppose
que l’écume blanche
sur la falaise se blesse
et que je te demande
de suspendre la promesse
pour qu’au petit matin
l’océan ne soit qu’une caresse.
Suppose
que la bise
sur ma joue se pose
et que je te demande
de souffler l’impertinent amant
pour que de l’aquilon
naisse un meilleur levant
Sabine
Poèmes du visage
Les yeux presque noirs,
Avec au coin, les empreintes de toute une vie,
La bouche entrouverte,
Comme toujours prête
À crier sa peur du noir
Et le front affleurant quelque chose au loin…
Le front affleurant quelque chose au loin,
Les rides qui comblent les recoins,
Les yeux béants de tout savoir,
La bouche rouge d’espoir,
Le nez des voluptés retrouvées…
Laisse mon ouïe vagabonder,
Me voilà devenue vieille,
Mamie au pays des merveilles.
Rosca
Des cheveux blonds sur ciel purpurin
un visage rond et poupin
dans l’insouciance de l’instant,
la spontanéité, elle jette le gant
quand germe une bataille dans le foin ;
le front affleurant quelque chose au loin…
Christiane
Le front affleurant quelque chose au loin vers les îles grecques
Les cheveux flottant dans la brise comme le pavillon de son voilier
Les yeux couleur azur côté méditerranée
Le sourire haut ou bas selon la marée
Le nez pointé cap vers l’horizon
La voix douce à ensorceler les sirènes
Il est heureux comme Ulysse…
Ulysse n’a qu’à bien se tenir…
Marie
Les boucles brunes qui t’enveloppent,
ton petit minois tout en finesse,
tes grands yeux qui s’interrogent,
et ton sourire qui illumine l’ensemble.
Enfin, le front affleurant quelque chose au loin,
comme la vie qui s’offre à toi et que tu vas découvrir.
Yveline
Dans ses vêtements trop grands
Bras écartés comme un aveu d’impuissance
Tête à la renverse
Le front affleurant quelque chose au loin
Sa solitude est insupportable
depuis qu’il ne sert plus à rien, l’épouvantail.
Jean
Un espace lumineux sur les terres hautes
Où chevauche la cavalière, cheveux au vent,
Elle retient sa monture après le galop
Inspire profondément l’odeur des herbes foulées
Et la sueur de son cheval
Son front affleurant quelque chose au loin,
Elle regarde le ciel et rit d’excitation.
Monique
L’enfant.
La courbe de la joue si fragile encore dont on voudrait que jamais la douceur ne fane.
Le sourire perlé de dents minuscules, rondes et blanches, qui se préparent déjà à la morsure.
L’œil noisette, si grave parfois, et réfléchi, qui questionne.
Le front affleurant quelque chose au loin vers un avenir où on ne sera pas.
Michèle
Les yeux couleur de l’aube
se réjouissent du jour nouveau
le front affleurant quelque chose au loin
se plisse aux premiers rayons du soleil
les joues roses illuminent le matin
les lèvres s’entrouvrent et laissent passer le souffle
souffle de vie, respiration d’un instant.
Carole
Le front affleurant quelque chose au loin
la petite fille n’a pas envie de rire
elle pince la bouche, grimace, fronce les sourcils
dans ses yeux clairs l’affolement
C’est qui ce bébé chauve, demandent les enfants ?
Mais c’est moi dit la grand-mère, chez le photographe, j’avais juste un an !
Achem
La lourde porte de la prison s’est refermée.
Bruit grinçant de bottes sur la neige fraîche. Une longue silhouette de jeune femme, un pochon en plastique gonflé à la main, s’avance dans la brume matinale, sans même se retourner. Sur le parking d’en face, à une centaine de mètres de là, se font entendre deux bruits secs de portières qui claquent. Une petite main d’enfant se dégage d’une grosse main d’homme. Le garçonnet bouscule quelques passants et s’élance en direction de la pâle silhouette féminine, son front affleurant quelque chose au loin.
Instant irréel : la mère ouvre grands ses bras chargés pour recevoir son enfant et le faire tournoyer dans les airs. Les voix fendent le brouillard :
— Maman ! Maman !
— Mon p’tit Louis, je suis libre !
Maï
Dimanche Élise fête ses cent ans
Son visage serein brille mystérieusement
Des amis sont venus
La chambre déborde de fleurs,
Et de fleurs nourrissant ses yeux de jardins oubliés
Ses narines pincées ne perçoivent plus l’odeur suave des lys
Une à une les rides semblent former des interrogations et une appréhension secrète
Le front affleurant quelque chose au loin.
Myline
Le regard hagard, exorbité et vide,
Le front affleurant quelque chose au loin,
Les pupilles agrandies, éperdues de terreur,
Des larmes creusant des sillons dans sa chair,
La bouche béante et muette
Dont un cri silencieux tentait de s’échapper.
Nicole
Sur la place du village un chapiteau
Sous le chapiteau une piste animée
Farine éparpillée, liquide éclaboussé
Clown en chapeau pointu et habits colorés
Le front affleurant quelque chose au loin
Quelque chose comme des éclats de rire soudains.
Catherine
Lire sur ton front quelque chose au loin
Lire dans l’encre de tes yeux les rêves fous
Lire dans le creux des rides les cicatrices
Lire sur les joues l’écho des larmes
Lire sur les lèvres le sourire cadenassé
Lire sur le visage les malentendus
pour enfin lire ton cœur bâillonné.
Sabine
Ôte donc ce masque qui te cache
Ce n’est pas la saison du carnaval !
Je sais que ton regard est plus doux que tu ne le penses
Accroche à tes yeux, à tes lèvres un sourire de perles,
Bas les masques
« Je t’imagine ainsi, le front affleurant quelque chose au loin »
Martine
À la paupière fragile
la courbure des cils
tremble
puis le sursaut
la pupille en alerte
la bouche inquiète
le front affleurant quelque chose au loin.
Anne
C’est une photo sur la table de nuit
Ton front affleurant quelque chose au loin
Tu pointes du doigt ce paysage que tu aimais tant
Tu pointes du doigt les combats gagnés et perdus
De ta vie d’homme engagé
Ton visage illuminé me donne l’espoir
D’une vie sans cesse renouvelée.
Je me souviens de toi Pépé
Ton front affleurant quelque chose au loin
Le Pépé de mon enfance
Celui qui préparait mes tartines de crème
Celui qui l’âge avançant
S’est retrouvé le front dégarni
Comme pour ramener les souvenirs
À la surface de sa vie.
Christine