Poèmes des adultes 2014
Ces textes ont été écrits par les membres de l’atelier d’écriture du Foyer rural de Verrines: “Les Écrits de la Belle”.
Ils ont été réalisés au cours de séances d’écriture sur le thème de l’art.
En hommage à la mémoire de Guy Griffault, poète et coanimateur de l’atelier d’écriture, nous avons intégré dans notre choix des poèmes écrits en 2010 lors d’un atelier qu’il avait dirigé autour du lien peinture et poésie. Braque, Magritte, Chagall, Picasso, Miro et bien d’autres, ont alors inspiré nos écrits.
Les poèmes datés de 2014 ont été écrits lors d’ateliers animés par Huguette Quintreau et Jean Meloche sur le thème du Printemps des poètes: “La poésie au cœur des arts”. La peinture y est encore à l’honneur.
Notre objectif est de contribuer à l’essor poétique de notre ville, en lien avec la Municipalité et tous les partenaires, scolaires ou associatifs.
Agréable promenade dans nos mots.
Huguette Quintreau, coordinatrice de la poésie celloise
Panneau double face – Mairie
Quand un tableau devient poème
Quand je l’ai connu
je suis devenue reine de l’Olympe.
Il m’avait tout promis…
Les jardins suspendus de Babylone.
Le colosse de Rhodes.
Le phare d’Alexandrie.
Les pyramides et leur royauté.
Le temple de Diane à Éphèse.
Le Zeus de Phidias.
Le mausolée d’Halicarnasse…
J’étais la huitième merveille du monde
Je flottais sur les ailes d’Apollon.
Je savourais l’ambroisie.
J’étais déesse.
Mais autant en emporta le vent
le vent qui balance doucement
les palmes de ma mélancolie
le vent qui entretient
la flamme du rêve.
Guy – 2010
Chut
La guitare dort.
Le roi
n’écoutera pas
la musique.
Ce soir
il regardera
la lune.
Guy – 2010
Les cubes
Des cubes.
Des centaines de cubes.
Des milliers de cubes
ont germé dans la vallée.
Alignés et serrés
comme des soldats de plomb
sur des lignes en désordre.
Des cubes qui fument.
Des cubes qui boivent
mangent, chantent et dansent.
Des cubes hilares.
Des cubes austères.
Des cubes en dentelle.
Des cubes en costume
trois pièces.
Des cubes plantureux.
Des cubes besogneux.
Esprit grégaire,
ils se sont agglutinés
autour de la cathédrale.
Il faut de tout pour faire
une ville.
Guy – 2010
Femme rêvant
Il rêve qu’il est dans son rêve
Son rêve à elle
Et qu’il la rêve
D’où un certain degré d’abstraction
Encore que les courbes dont il rêve
Soient très suggestives
Et bien à elle
Dans son rêve
Elle ondule
Elle se cambre
Elle danse et l’entraîne
En un tourbillon voluptueux
Leurs corps se frôlent
Se provoquent
S’éloignent
Se rapprochent
S’enlacent et se mêlent
Et vient le moment où
La tête se renverse
Elle crie
Elle crie
Et son rêve à lui
Dans son rêve à elle
Se disloque et s’éparpille
S’évapore en courbes sensuelles et colorées
Que maintenant sa main étonnée
Trace sur la feuille
Comme dans un rêve.
Jean – 2010
Aux confins du néant
N’as-tu rien dans la tête?
disait la mère d’un ton sévère
Si, j’ai un petit nuage blanc
répondait en souriant l’enfant.
C’était son excuse, sa fuite
le calice de son existence
pour échapper à la rudesse du monde
la beauté cristalline de son innocence
pour éclairer sa route
la coupe de sa vie
pour y voir son bonheur
Merci petit nuage blanc !
Sabine – 2010
Ton visage n’est pas le ciel
Mais il en est le bleu rivage
Couleur de rêve et de soleil
Bouquet énorme de mariage
Achem – 2010
Dans une douce langueur
La tête s’est renversée
Comme elle s’est renversée
Sensuelle au mystère de la procréation
Son corps alourdi s’épanouit
En volutes et volumes extensibles
Ses mains protectrices et caressantes
Dévoilent une rondeur palpitante et feutrée
Elle se laisse aller déjà à ses désirs siens
Je veux que tu, non tu seras ce que tu…
Elle enlace dans les limbes le présent et le futur
Un murmure d’abandon se glisse entre ses lèvres
Elle rêve d’être mère
Maryline – 2010
Pour vous je ne suis que des traits
Certes bien crayonnés sur du papier
De moi vous ne saurez rien
Du moins rien que je ne puisse vous expliquer
Je suis trop lisse, sans reflet, sans expression
Et je ne soulèverai pas mon chapeau
Mais moi je vous regarde
Je vous devine
Je vous transperce
Je vous sonde
Je peux même vous mettre à nu
Rien qu’en regardant votre visage
Car vous
Vous n’êtes pas lisses
Avec vos rides et vos yeux
Qui voudraient tout savoir
Mais savoir quoi?
Ah! ce qu’il y a sous mon chapeau?
Maryline – 2010
Le passage
Sirène sur son rocher elle rêve.
Plonger sous l’eau et regarder le monde à l’envers.
Là-haut le couvercle de la surface
Miroir transparent sans frontière.
Ici les poissons colorés qui ondulent
Et fuient comme une nappe qui se soulève,
Et la houle qui arrache au fond de sable
Les algues vivantes rejetées sur la plage.
Un passage facile d’un monde à un autre
Comme une porte entrouverte entre deux univers.
Monique – 2010
La femme qui pleure
Femme au cœur brisé, tu cries ta douleur!
Les couleurs du passé ont déteint sur ton visage
Et l’avenir t’apparaît tel un champ de désolation
Femme au cœur brisé devenue arc-en-ciel
Sauras-tu garder un dernier élan de coquetterie
Une fleur à ton chapeau?
Catherine – 2010
Arabesques
De la terre au ciel
en quelques courbes épurées
ligne de visage
ligne de corps
ligne de vie
s’enlacent dans un trichrome sensuel.
L’œil clos et rêveur
la pensée se transforme
en un pas de deux effréné
où deux corps cambrés ondulent.
Serrés, vivants, animés
par le rythme des trémolos
les arabesques libertines
s’élancent dans un tango intemporel.
Sabine – 2010
Le jongleur bleu de Picasso
Saltimbanque amaigri
À la tête inclinée
Tu rêves d’un monde meilleur
Ou simplement tu humes
L’instant présent avec résignation.
Pourquoi cette couleur triste?
As-tu froid dans la crainte
De perdre ta vie ce jour?
Et si c’était le bleu de l’air méditerranéen
Qui a déteint sur la toile?
Viens, sors de là, le soleil brille
Ouvre tes yeux juvéniles
Et souris, la magie t’appartient.
Monique – 2014
Effet d’équilibre dans cet enchevêtrement désorganisé
Réveil et bouillonnement d’une terre ensoleillée
L’œil du visionnaire regarde l’univers
L’univers, une explosion de formes et de couleurs
De pleins et de déliés
De flèches directionnelles et de signes divers
Étoiles et lunes flottent dans le cosmos
Animées par des couleurs franches
Bleu du ciel, noir de la nuit, rouge sang
Fusion de l’homme et de l’univers
L’homme au cœur de l’univers
L’Homme au cœur de l’art.
Catherine – 2014
Autres mots autour de l’art et de la couleur
La poésie
C’est comme un sésame
Une fenêtre ouverte sur l’infini
Une respiration des âmes
Marie – 2014
En art
j’aime ne pas savoir
afin de continuer
à chercher
Achem – 2014
C’est quoi la peinture?
L’art de croquer les figures?
De détremper les couleurs
Pour maroufler ses peurs?
Neutraliser ses douleurs,
Esquisser un ailleurs
Où les couleurs primaires
Se mêlent aux secondaires
Pour modeler un nouvel horizon,
Mettre en trompe-l’œil toutes nos émotions.
Rosca – 2014
Il avait dit
les arts
mais elle avait compris
lézard
lui, parlait d’aquarelles
mais elle,
l’avait vu rentrer le lézard
il était quelque part
dans la cuisine
elle le poursuivait
avec son balai
lui continuait d’écouter
France Culture
jamais plus
ils ne se rencontraient
Achem – 2014
Mon cher carmin
Dit Carmen en rougissant
Vous n’êtes ni mon père
Ni mon frère
Ni mon mari
Ni mon amant
Mais je vous aime quand même
Jean – 2014
Coquelicots et trèfles incarnats
Ondulent sous le soleil rouge
Rouge-gorge se gorge de cerises rouges
Sous le cerisier il ne reste que
Noyaux, queues et feuilles rouges.
Christiane – 2014
Le pêcheur de corail
plonge dans la Mer Rouge
Tableau improbable
Alizarine et garance
Christiane – 2014
À perte de vue
Un champ de blé
Je ne vois que toi
Unique coquelicot
Christine – 2014
C’est quoi ce bleu?
Une base de camaïeu,
Avec plusieurs nuances de bleu.
Mais ça sert à quoi tant de bleu?
Tu y vois ce que tu veux,
Avec ou sans tes yeux.
Après tout le bleu,
C’est aussi la couleur des cieux…
Mais le peintre, il n’exagère pas un tout petit peu,
De vendre si cher une tache bleue?
Est-ce qu’il croit que c’est un jeu,
Est-il si malicieux
Qu’il nous prend pour des mafieux
Si vieux,
Si hideux,
Si sirupeux,
Qu’il peut,
S’il veut,
Transformer l’espoir en spiritueux !
Rosca – 2014
La peinture
La peinture,
cette grande dame
tantôt figurative
tantôt naïve
tantôt abstraite
a su, par la maîtrise de ses styles
telle une fée
s’incarner en une multitude d’approches
pour se laisser subtilement interpréter
Une émanation harmonieuse
entre le fond, la forme
et la technique picturale
engendre
une sorte d’eurythmie
qui m’invite
à contempler
à visiter
pour qu’à l’issue de mon investigation
je devienne
la favorite
la secrète et mystérieuse visiteuse
celle qui butine et fait frémir
“La forêt de hêtres” de Klimt
ou “Les baigneuses” de Cézanne
Marie-Gérardine – 2014
Pour faire le portrait de ton aimé
pas besoin d’un chevalet
d’une palette, d’une toile
pas la peine d’être une huile
ni célèbre impressionniste
Laisse-toi impressionner
par le clair-obscur romantique
d’une balade dans le champ chromatique
sous un arc-en-ciel de pastel
Et dans le dégradé du bleu de ses yeux
vois la patine du temps qui passe
qui colore tes joues en rouge-feu
mets une touche de jaune d’or au fond de tes yeux
et peins le ciel en un tableau infiniment bleu
Avec l’esquisse d’un sourire
Trempe ta plume dans la couleur du bonheur
ou dans l’encre sympathique
Croque la vie, légère et belle
comme une aquarelle.
Marie – 2014